Portrait d’une femme exceptionnelle : Mila Racine, sauveuse d’enfants juifs
Article de Abdallah Soidri : http://www.marianne.net/portrait-femme-exceptionnelle-mila-racine-sauveuse-enfants-juifs-100240887.html
Ce mardi 8 mars 2016 est la Journée internationale des droits des femmes. C’est aussi l’ouverture d’une exposition au Mémorial de la Shoah, à Paris, intitulée « Femmes en résistance ». Laquelle sera suivie, dans dix jours, par la parution d’une BD sur l’une d’elles : Mila Racine. Résistante française, son combat était de sauver les enfants juifs de la déportation. Retour sur l’itinéraire de cette héroïne, grâce à l’éclairage d’Emmanuelle Polack, à l’origine du concept de la BD.
Mila Racine est prête à tout pour sauver les enfants d’une mort certaine. Quitte à finir ses jours en détention. Son histoire commence quand elle naît à Moscou, le 14 septembre 1919. Dès 1922, sa famille fuit le régime soviétique. Direction la France, le pays des droits de l’Homme, où elle étudie au lycée Racine, à Paris, dont elle ressort diplômée en 1936.
Quand la Seconde Guerre mondiale éclate, Mila s’engage rapidement. Elle est d’abord assistante sociale dans les camps d’internement du Sud de la France, « véritables camps de transit pour les Juifs vers la déportation« , comme l’écrit Emmanuelle Polack dans la bande dessinée qui lui est dédiée. Devant « l’accélération des persécutions contre les Juifs, Mila Racine propose de recueillir les enfants que les mères souhaitent mettre à l’abri des déportations« .
Tout s’accélère en 1942 avec la « rafle du Vel’ d’Hiv » : les enfants aussi sont désormais « passibles de déportation« . Inadmissible pour Mila Racine. La jeune femme, âgée de 23 ans seulement, entre alors dans une « organisation juive de résistance« . Avec son frère, Émile Racine, et George Loigner, ils créent même un réseau pour venir en aide à ces enfants. Pendant 21 mois, de janvier 1942 à octobre 1943, elle les emmène par convoi à Annemasse (Haute-Savoie) pour ensuite les faire traverser la frontière franco-suisse.
Le 21 octobre 1943, la résistante est arrêtée par les Allemands à seulement 200 mètres de la frontière suisse. Elle transportait « 32 enfants âgés de 2 ans et demi à 18 ans« . Eux aussi sont arrêtés. Tous sont emprisonnés à Annemasse, au siège de la Gestapo. Grâce à l’intervention du maire de la ville, Jean Deffaugt, les enfants sont libérés. Il propose alors à Mila un plan d’évasion. Mais « craignant que les enfants, ou Jean Deffaugt (…) soient tenus pour responsables, si elle parvient à s’échapper« , celle-ci refuse.
Par la suite, la jeune femme est emprisonnée dans la prison de Montluc à Lyon, là-même où Jean Moulin était détenu (en juin 1943). Là-bas, elle passe sous silence « son identité juive« , s’appuyant sur « une fausse identité« , Marie-Anne Richemond, ce qui lui évite de finir dans un camp d’extermination. Elle est envoyée au camp de Royallieu à Compiègne, le 25 octobre 1943. Puis, dans le camp de Ravensbrück en Allemagne en 1944. Pour finalement finir à Mathausen, où elle fera partie d’un Kommando (groupe de travail actif) : elle accompagne un groupe de travailleuses pour restaurer les voies ferrées détruites par les bombardements alliés. Tragique ironie de l’histoire, c’est à quelques jours à peine de la libération du camp de concentration qu’un bombardement des Forces alliées, le 20 mars 1945, la tue.
Dans ces camps, Mila Racine a laissé l’image d’une femme « à la conduite exceptionnelle« , d’après les témoignages de grandes figures de la Résistance française qui l’ont côtoyée, comme Marie-José Chombart de Lauwe, Denise Vernay ou encore Germaine Tillion. « On lisait dans ses yeux (…) la ferme détermination de ne se laisser vaincre ni par l’ennemi, ni par ce milieu dans lequel nous vivions. Elle était toujours gaie, serviable, elle s’occupait beaucoup des vieilles femmes et des malades« , dira ainsi Gaëtane, une compagne de déportation à Ravensbrück.
Près de 60 ans après sa mort, l’histoire méconnue de cette héroïne refait surface pour être révélée au grand public. Elle et d’autres sont ainsi mises à l’honneur au Mémorial de la Shoah dans une exposition qui leur est consacrée. Mila Racine a même droit à sa bande dessinée, qui sortira le 18 mars.
>> Exposition « Femmes en résistance » au Mémorial de la Shoah, du 8 mars au 30 septembre 2016. 17 Rue Geoffroy l’Asnier, 75004 Paris.
>> Femmes en résistance, Tome 4, Mila Racine. Scénario : Francis Laboutique, Emmanuelle Polack, Régis Hautière / Dessin : Olivier Frasier / Casterman. 18 mars 2016
Pour aller plus loin >> Le genre de la Résistance, par Catherine Astol-Lacour, éd. Presses de Sciences Po
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Les marchands d’Hitler
En novembre 2013, une fabuleuse collections de tableaux est découverte dans un vieil appartement de Munich : 1500 dessins, peintures et toiles de maîtres acquis en grande partie sous le IIIe Reich par l’un des marchands d’art d’Hitler. Dans les années 30, Hildebrand Gurlitt, spécialiste de l’art moderne, profite de ses accointances avec les nazis pour s’enrichir. Dans le Paris occupé, en 1940, le marché de l’art français profite de la manne allemande, et Gurlitt devient un assidu de l’hôtel Drouot, alimenté par les confiscations antisémites et les ventes forcées. A sa mort, Cornelius, son fils, s’engage à rendre les pièces spoliées.
Lorsque en juin 1945 les « Monuments Men » (1) mettent la main sur les œuvres spoliées à des familles juives, que Hildebrand Gurlitt (1895-1956) a cru mettre à l’abri en Bavière, ils n’imaginent pas que ces cent quinze toiles constituent à peine plus d’un dixième du trésor indûment amassé par ce marchand d’art allemand. Collection dont son fils Cornelius (1932-2014) héritera, et qu’il conservera dans son appartement de Munich, jusqu’à ce que la police découvre, en 2012, ces mille quatre cent six pièces.
A travers ce cas, Stéphane Bentura s’attache à l’histoire des spoliations et des pillages d’œuvres d’art dont se rendirent coupables le pouvoir hitlérien et maints opportunistes sous le IIIe Reich. Emmanuelle Polack a été interviewée dans le cadre de ce documentaire diffusé en décembre 2015.
http://television.telerama.fr/tele/programmes-tv/les-marchands-d-hitler,89799907.php
Read MoreL’Espionne aux tableaux, Rose Valland face au pillage nazi
Assistante au musée du Jeu de Paume durant la guerre, Rose Valland a documenté les spoliations artistiques nazies au péril de sa vie.
Puis, elle a sillonné l’Allemagne en ruine pour retrouver les œuvres disparues. Des 100 000 œuvres d’art expédiées en Allemagne, plus de la moitié reviendront en France grâce à son inlassable activité. Encore aujourd’hui, ses archives sont décisives pour les restitutions aux propriétaires.
Dans le cadre du mois du film documentaire, le Mémorial de la SHOAH a projeté le documentaire « L’Espionne aux tableaux, Rose Valland face au pillage nazi » de Brigitte Chevet, le jeudi 26 novemvre 2015 à 19h30, en présence de la réalisatrice et d’Emmanuelle Polack, chercheur accueilli à l’INHA.
Read MoreL’héritage Gurlitt face à son histoire
Le Musée des Beaux-Arts de Berne a annoncé qu’il acceptait l’héritage du collectionneur d’art allemand Cornelius Gurlitt, un trésor de plus de 1.500 œuvres dont certaines, volées à des juifs par les nazis, seront restituées aux ayants droit.
Invitée de France Inter le 28 novembre 2014, Emmanuelle Polack, membre du groupe de travail sur les provenances d’œuvres récupérées après la seconde guerre mondiale en parle avec Cyril Sauvageot.
Ecoutez l’émission
http://www.franceinter.fr/emission-un-jour-dans-le-monde-l-heritage-gurlitt-face-a-son-histoire
Read MoreExposition Amy Johnson au musée de l’Air et de l’Espace
Le musée de l’Air et de l’Espace a présenté, du 17 mai au 31 août 2014, une exposition dédiée à l’aviatrice britannique Amy Johnson, première femme à avoir relié le Royaume-Uni et l’Australie en vol solo en 1930. L’exposition Amy Johnson – le destin d’une héroïne, faisait suite à la parution en 2013 de la bande dessinée Amy Johnson aux éditions Casterman.
Emmanuelle Polack, Commissaire externe de l’exposition, lors de l’inauguration
L’exposition Amy Johnson est une production originale du musée de l’Air et de l’Espace, qui s’est appuyée sur les dessins de Pierre Wachs et les recherches d’Emmanuelle Polack, scénarisées par Régis Hautières et Francis Laboutique.
Le musée a mis en lumière le courage et la détermination de l’aviatrice en illustrant les épisodes marquants de sa vie faite d’exploits, d’engagement pour l’avancée de l’aviation et de dévouement pour son pays en guerre. L’exposition a présenté une quarantaine de planches de BD, des croquis inédits du dessinateur et une soixantaine d’objets issus des collections du musée : affiches publicitaires et journaux d’époque, ouvrages anciens, plans et revues spécialisées, jeux et maquettes, objets techniques et photographies de l’aviatrice prises par plusieurs grandes agences de presse.
http://www.museeairespace.fr/actualites/aviation/8/exposition-amynbspjohnson/
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